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Il faut en finir avec la peine capitale en Tunisie
Un ouvrage choc vient de paraître, qui dénonce les dérives du système judiciaire tunisien.
Véritable manifeste contre la peine de mort, Le Syndrome de Siliana est un livre coup de poing. Il est signé par quatre auteurs qui ont entrepris de plonger dans les couloirs de la mort en Tunisie.
En décembre 2012, Samy Ghorbal, Héla Ammar, Hayet Ouertani et Olfa Riahi ont interrogé une trentaine de prisonniers, rapporte le site collaboratif Nawaat. Des militants et des personnalités politiques témoignent également des conditions de vie dans les prisons et des défaillances du système judiciaire tunisien.
Ce livre est «politique, mais pas partisan», selon Nawaat. Les gouvernements de Bourguiba et Ben Ali ont abusé de la peine capitale «comme moyen de répression politique», résume le site. Jusqu’en 2000, l’article nous apprend qu’une dizaine de condamnations est prononcée par an.
Un premier moratoire en 1991 puis un second signé avec les Nations unies en 2012 marquent cependant de grands progrès, d’après Nawaat: aucune sentence capitale n’est prononcée en 2011 (contre trois l’année d'après et une au premier semestre 2013) et 22 condamnés à mort sont graciés fin 2012. Mais la peine de mort n’est toujours pas abolie officiellement:
«La crainte du châtiment persiste dans la loi pour créer un effet dissuasif», explique l’article.
L’ouvrage dénonce aussi les conditions de détention particulièrement inhumaines, mais qui se sont améliorées, depuis le départ de Ben Ali. Bien souvent, les procès ne sont pas équitables et les aveux sont arrachés sous la torture: l’erreur judiciaire n’est jamais loin…
Les auteurs ne cherchent pas à excuser les actes commis par les condamnés, mais interrogent l’équité d’un système carcéral qui s’acharne sur les populations défavorisées: Nawaat révèle que 68,5% des condamnés à mort sont des travailleurs précaires, des chômeurs, ou des paysans. Un quart d’entre eux proviennent du gouvernorat déshérité de Siliana, qui a donné son nom à la publication.
Cependant, le tabou religieux est un obstacle à l’abolition pure et simple de la peine capitale. Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste Ennahda, semble réticent à abroger cette loi et un récent sondage repris par Nawaat montre que 70% des Tunisiens sont encore favorables à la peine de mort.
Lu sur Nawaat