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Kenya : Londres indemnise des victimes de sévices à l'époque coloniale

LONDRES (AFP) - (AFP)

Londres a finalement accepté jeudi d'indemniser financièrement plusieurs milliers de Kényans, une soixantaine d'années après la répression sanglante de l'insurrection des Mau Mau, une page particulièrement sombre de l'histoire coloniale britannique.

A Nairobi, environ 160 anciens guérilleros Mau Mau, certains très âgés, ont accueilli la nouvelle avec une intense émotion et une grande fierté.

Le gouvernement britannique a annoncé un accord d'un montant de 19,9 millions de livres (23,5 millions d'euros).Mais une fois les frais d'avocats payés, 5.228 plaignants se partageront en fait 13,9 millions de livres.Chacun d'entre eux recevra environ 2.600 livres, a précisé Martyn Day, avocat britannique les représentant.

"Le gouvernement reconnaît que des Kényans ont été soumis à des tortures et à d'autres formes de mauvais traitements lorsqu'ils étaient entre les mains de l'administration coloniale", a déclaré le chef de la diplomatie britannique, William Hague, devant la Chambre des Communes à Londres.

Au cours de cette intervention, qui fait suite à une bataille judiciaire de quatre ans engagée par des victimes, le ministre a exprimé les "regrets sincères" du gouvernement, sans aller toutefois jusqu'à présenter des excuses complètes.

"Je rends grâce au ciel que nous soyons encore en vie aujourd'hui pour vivre cela et que nous soyons indemnisés pour les atrocités qui ont été commises", s'est réjoui à Nairobi Habil Molo Ogola, âgé de 78 ans.

Le vieil homme a expliqué à l'AFP qu'après avoir tenté d'aider des prisonniers Mau Mau à s'échapper, il avait été détenu pendant trois ans et avait subi des tortures.

Gitu wa Kahengeri, porte-parole d'une association de vétérans Mau Mau, âgé de près de 90 ans, a lui salué "un grand jour"."Le gouvernement britannique a compris que nous avons besoin de justice.C'est le début d'une réconciliation entre les Mau Mau et le gouvernement britannique.C'est formidable pour nous qui avons lutté pour l'indépendance", a-t-il dit.

Au moins 10.000 personnes, selon l'estimation la plus basse, ont trouvé la mort pendant l'insurrection Mau Mau (1952-1960) contre le régime colonial, brutalement réprimée.A l'époque, l'attention internationale s'était surtout focalisée sur la mort de 32 colons blancs pendant la révolte.

Un grand nombre de plaignants kényans n'ont apparemment jamais porté d'armes, mais ils ont été maltraités après avoir été accusés de nourrir et d'aider les rebelles, qui menaient des attaques pour récupérer les terres fertiles des colons blancs.

Les tortures infligées aux insurgés incluaient "la castration, le viol, des violences répétées de la pire espèce", selon Martyn Day.

Pendant cette période sanglante, des dizaines de milliers de personnes ont été détenues, dont le grand-père du président américain, Barack Obama.

Le prix Nobel de la paix Desmond Tutu a salué l'"accord capital" annoncé jeudi, estimant qu'il faisait office de "baume pour les victimes et les auteurs de mauvais traitements choquants".

C'est "un moment historique", a réagi le cabinet britannique Leigh Day, représentant les victimes."Il est courageux de reconnaître publiquement pour la première fois la nature horrible du passé du Royaume-Uni au Kenya", a déclaré Martyn Day, estimant que la somme par plaignant n'était "pas énorme", mais "relativement significative".

Selon lui, cette décision d'indemniser les victimes de tortures pourrait mener des ressortissants d'anciennes colonies britanniques à envisager une action contre Londres, au Yémen, en Palestine, en Malaisie et à Chypre notamment.Mais William Hague a estimé que l'accord annoncé jeudi ne créait pas "un précédent" susceptible de faire jurisprudence dans d'autres dossiers relatifs à l'ex-empire.

Ces indemnisations mettent un terme à la procédure judiciaire engagée à Londres par les Kényans accusant les forces impériales britanniques de leur avoir fait subir des tortures et des sévices sexuels.

Jusqu'alors le Foreign Office avait fait valoir que le gouvernement kényan avait hérité de la responsabilité des faits commis pendant la période coloniale au moment de l'accession du pays à l'indépendance en 1963.

Outre les sommes annoncées au titre de réparation, qui représentent par personne environ trois fois et demi le salaire annuel d'un fonctionnaire kényan de base, le gouvernement britannique a indiqué qu'il aiderait à la construction d'un mémorial à Nairobi pour les victimes de tortures et de mauvais traitements pendant l'ère coloniale.

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