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Afrique du Sud - Des toilettes dans l'isoloir

Quand les Sud-Africains iront dans le secret de l’isoloir le 18 mai 2011 pour les élections municipales, ils voteront peut-être avec l’idée d’aller aux toilettes.

En effet, la campagne qui oppose le Congrès national africain (ANC), le parti du président Jacob Zuma à son rival l’Alliance démocratique (DA) s’est focalisée sur le «petit coin», observe le magazine sud-africain Mail&Guardian. Un sujet qui n’a rien de futile, à l'image du récent scandale porté devant la justice sud-africaine: dans les townships, les quartiers défavorisés noirs, certains équipements sanitaires construits par les autorités présentent un défaut majeur; ils ne disposent pas de cloisons.  

Dans la province de Western Cape, la Ligue de la jeunesse de l’ANC a porté plainte contre la DA au sujet de 51 toilettes à ciel ouvert construits en décembre 2009 à Makhaza, pour «atteinte à la dignité humaine». Le 29 avril 2011, la Haute cour de Western Cape a jugé que la DA devait fournir des cloisons à 1.316 toilettes construits à Cape Town, et gérés par le parti. Le débat a alors dérivé sur la question raciale, l'ANC taxant son adversaire DA de parti de privilégiés blancs.

Mais voilà que l’ANC a été pris à son propre piège: le 8 mai 2011, les médias sud-africains ont révélé qu'en 2003, le parti avait installé 1.600 toilettes à ciel ouvert à Moqhata, qui n'ont jamais été cloisonnés. La Commission pour les droits de l’homme a même enquêté sur cette défaillance. L’affaire embarrasse l’ANC qui fait profil bas et promet de prendre des mesures. Ses dirigeants se sont rendus sur place:

«Des têtes doivent tomber», a prévenu le leader du mouvement des jeunes de l'ANC Julius Malema.

Le maire ANC de Moqhaza pourrait en faire les frais, d’autant plus que durant son mandat de conseiller municipal, il avait remporté l’appel d’offres pour la construction des toilettes incriminées. Pour le Mail&Guardian, la polémique sur les W.-C. traduit un malaise plus général sur la qualité des services de base fournis à la population et qui préoccupent les électeurs sud-africains.

«De différentes manières à travers le pays, des problèmes de facturation dans les quartiers riches de Johannesburg aux sanitaires des townships du Cap, ainsi que l'accès au logement, à l'eau et l'électricité dans les zones pauvres, c'est la question de la distribution des services plutôt que le thème racial qui a occupé l'agenda.»

Et l'hebdomadaire sud-africain d'en conclure que ces élections municipales pourraient être les premières à se jouer principalement sur la question de la bonne gouvernance des autorités.

Lu sur le Mail&Guardian