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Un film sur le passé «terroriste» de Nelson Mandela

Le réalisateur britannique Peter Kosminsky projette de réaliser un film sur la jeunesse de l’ancien président sud-africain Nelson Mandela. Mais le biopic risque d’être controversé: il se donne pour ambition de portraiturer celui qui a mis fin au régime d’apartheid en chef de file du bras armé «terroriste» du Congrès national africain (CNA).

Kosminsky se refuse en effet à éluder l’aspect violent du passé de Mandela, rarement mentionné:

«J’essaie de décrire la jeunesse de Mandela jusqu’à son emprisonnement. On le considère à juste titre comme le plus grand homme du monde, un homme qui a évité à l’Afrique du Sud de basculer dans la guerre civile, mais il ne faut pas oublier qu’il a autrefois appartenu à la branche armée du CNA […] Mon but n’est pas de démolir son image, je suis certainement l’un de ses plus grands fans.»

Pour le réalisateur, il s’agit de montrer aux gens que Mandela est une figure plus complexe qu’il n’y paraît. Le film, encore à l’état de projet, devrait comporter une scène dans laquelle le leader politique enseigne à des militants comment faire exploser un immeuble tout en insistant sur la nécessité d’éviter les pertes humaines. Des propos qui risquent d’écorner le mythe:

«Mandela est un terroriste qui est devenu un homme d’Etat et un pacifiste […] Le moment crucial pour un ancien terroriste est l’instant où il agit contre son intérêt personnel, où il tend l’autre joue», ajoute le réalisateur.

Ce n’est pas la première fois que Kosminsky se lance dans le traitement d’un sujet politique complexe et controversé. Dans The Promise (Le Serment), un téléfilm en quatre épisodes, il a comparé la lutte sioniste contre les forces britanniques dans les années 1940 aux attentats-suicides des Palestiniens en Israël. La série a été à cet égard vivement critiquée et vilipendée comme une attaque contre Israël. Pour le réalisateur, le parallèle entre la situation des noirs en Afrique du Sud et celle des Palestiniens en Israël est évident:

«C’est une situation d’apartheid. Ce n’était pas mon but que de le montrer dans The Promise, mais si vous me posez la question personnellement, c’est ce que je pense. Ce qui se passe en Israël est très semblable au concept sud-africain de développement séparé. Cela me rappelle le système des bantoustans en Afrique du Sud.»

Nul doute qu’avec son film sur le passé ignoré de Mandela, Kosminsky s’apprête à susciter des réactions houleuses. Pourtant, il ne faut pas oublier que Nelson Mandela et son parti n’ont été rayés de la liste noire des terroristes aux Etats-Unis qu’en 2008.

Lu sur le Guardian