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Ouganda - Des manifestations pacifiques réprimées dans le sang
Kizza Besigye, président du Forum for Democratic Change (FDC), principal parti d’opposition en Ouganda, a été violemment arrêté par les forces de l’ordre jeudi 28 avril 2011. Sous l’œil des caméras d'Al-Jazeera, un policier en civil a brisé les vitres de la voiture dans laquelle se trouvait le leader de l’opposition et procédé à son arrestation après l’avoir aspergé de gaz lacrymogène.
Hospitalisé à Nairobi (Kenya) pendant quelques jours à la suite de cette intervention musclée, l’état de santé de Besigye n’est pas préoccupant, rassure l’un de ses médecins:
«Il a été blessé aux yeux (...) par des produits chimiques, nous avons pu l'examiner (...), les tests médicaux nous ont rassurés.»
Bien que cette interpellation n’aie duré que quelques heures, c’est la quatrième fois en trois semaines que Besigye doit faire face à une telle répression policière. Deux mois après sa troisième défaite à l’élection présidentielle face à Yoweri Museveni, il a lancé le 11 avril un mouvement populaire contre la cherté de la vie.
Dans le pays, traversé par une crise socioéconomique, et dès le lendemain de l’interpellation du leader de l’opposition les manifestations se sont multipliées, notamment à Mbale, dans le sud-ouest du pays. Les protestations, durement réprimées, ont fait au moins deux morts et 120 blessés, comptabilise la Croix Rouge ougandaise. Les forces de l’ordre semblent avoir ouvert le feu sur les manifestants, blessant par balles au moins onze personnes.
Le gouvernement multiplie les déclarations contradictoires et peine à convaincre qu’il ne joue aucun rôle dans la répression dont fait l’objet Kizza Besigye. Alors que le secrétaire d’Etat aux Affaires intérieures, Matia Kasaija, a affirmé sa désapprobation, le ministre de l’Intérieur, Kirunda Kivejinja a quant à lui clamé que l’intervention policière était légitime:
«[La police] n’a fait qu’exercer son mandat constitutionnel de faire régner la loi et l’ordre en dispersant les rassemblements. Elle est autorisée par la loi à ouvrir le feu sur la population pour prévenir et détecter le crime.»
Le 1er mai 2011, lors d’une conférence de presse donnée dans la capitale kényane, Kizza Besigye a appelé ses partisans à ne pas encourager une escalade de la violence mais à poursuivre des manifestations pacifiques:
«La population est largement marginalisée et proteste maintenant contre cette marginalisation. Ces manifestations pacifiques vont bien sûr continuer, sous une forme ou sous une autre, jusqu'à une réponse appropriée [des autorités] à la situation.»
La Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Navi Pillay, a exhorté les autorités ougandaises à la retenue et s’est dite choquée du traitement infligé à Kizza Besigye:
«Je n'approuve pas tacitement les émeutes violentes qui se sont déroulées, mais les autorités ougandaises doivent se rendre compte que ce sont leurs propres actions qui ont transformé des protestations pacifiques sur l'augmentation des prix des denrées alimentaires et de l'essence en une véritable crise nationale.»
Lundi 2 mai, au moins cinq manifestants ont été interpellés dans la ville de Mbarara. La répression policière ne décourage cependant pas les protestataires, ainsi que l’a affirmé Sampson Kizza, président des jeunes du FDC:
«Nous continuerons jusqu’à ce que le gouvernement nous reconnaisse le droit de manifester pacifiquement.»
Lu sur Daily Monitor, Al-Jazeera, allAfrica.com