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La nouvelle vie des anciens enfants-soldats du Sud-Soudan
Lual Kuan a 25 ans. Il n’a pas toujours été employé à la Commission de désarmement, de démilitarisation et de réintégration (DDR) à Juba, la capitale du Soudan du Sud, comme il l’est aujourd’hui. Dans un passé pas si lointain, il était enfant-soldat au service de l’Armée populaire de libération du Soudan (Spla), aujourd’hui devenue l’armée du tout nouvel Etat proclamé le 9 juillet 2011. C’est dans les colonnes du quotidien espagnol El País que Lual a raconté son enfance brisée, et les raisons pour lesquelles il aspire aujourd’hui à une vie normale.
«Aujourd’hui, mon objectif est de mettre de l'argent de côté et de retourner dans mon village pour travailler comme un petit agriculteur. C’est tout ce que je souhaite.»
Enfant, Lual vivait dans une région à la jonction entre le Nord et le Sud-Soudan. Des tribus arabes nomades à la solde de Khartoum avaient commencé à attaquer son village.
«Ils enlevaient des petits garçons pour garder leurs vaches et des petites filles pour la cuisine, ou ils les épousaient. Sinon, ils allaient les vendre dans le nord comme esclaves.»
Quelques temps après, au moment de l’intensification de la guerre entre le nord et le sud du pays, la SPLA décide de recruter des jeunes pour grossir leurs rangs.
«Il (le grand frère de Lual) a rejoint la SPLA en 1995 et deux ans plus tard, il est mort à la guerre. C’est la raison pour laquelle je me suis enrôlé: pour venger sa mort.»
Lual avait 12 ans lorsqu’il s’est engagé. Si ses tâches se sont, pour la plupart, limitées à être aide de camp, il a tout de même reçu une instruction bien particulière.
«Nous allions à l’école, mais nous recevions en même temps un entraînement militaire, tel qu’apprendre à manier un AK-47.»
En 2004, grâce à l’initiative de l’Unicef et de la Coalition pour l’interdiction des enfants-soldats, Lual a pu rentrer chez lui. A cette époque, on chiffrait entre 2.500 et 5.000 le nombre de mineurs combattant pour la SPLA.
Contre toute attente, Lual continue ses études jusqu'à être diplômé de l'université de Juba, transférée à Khartoum à cause de la guerre. Dès la fin de son cursus et à l’annonce de la partition du pays, il décide de rentrer à Juba comme les 300.000 autres exilés de la capitale du Soudan du Sud. Bien sûr, la réalité n’est pas à la hauteur de ses espérances.
«J’ai répondu à plus de 50 offres de travail par le gouvernement, mais je n’ai eu aucun retour […] C’est très difficile, parce qu’il n’y a pas de travail pour les anciens combattants. Le gouvernement doit investir pour leur créer des emplois et ainsi éviter qu’ils ne reprennent les armes et causent de nouveaux problèmes.»