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«Macbeth, Leila et Ben», la pièce qui revisite la révolution tunisienne
Le dernier spectacle du metteur en scène tunisien Lofti Achour, «Macbeth, Leila and Ben, a bloody story», s'était déjà attiré les faveurs du public londonien, pour l'édition 2012 du World Shakespeare Festival.
Le metteur en scène revient sur sa terre natale, à Tunis précisément, pour y présenter cette dernière création, à partir du 19 février 2013, rapporte Kapitalis.
Trente ans d'histoire tunisienne jusqu'à la veille de la révolution de Jasmin, voilà ce que met en lumière «Macbeth: Leila and Ben».
Hobb Story: Sex in the (Arab) City, sa précédente pièce datant de 2009, traitait de la question de la sexualité dans le monde arabe. Hobb Story avait déchaîné des torrents d'injures et de menaces. Face aux pressions, une partie de l'équipe, prise de panique, avait alors décidé de jeter l'éponge, se souvient Jeune Afrique.
«On se débrouillait pour contourner les interdits, avait déclaré Lofti Achour. Lors de notre premier passage devant la commission de censure, nous avons négocié, enlevé deux ou trois choses. La pièce a rencontré un vif succès.»
Qu'en a-t-il été pour «Macbeth: Leila and Ben»? On l'ignore encore, mais la version qui s'est jouée hier à Tunis pourrait être légèrement différente de celle proposée au Globe Theater de Londres l'été dernier.
Selon le blog The Arab Review, la pièce jouée à Londres est résolument anti-islamiste, et interroge sur l'alternance de dictateurs au pouvoir.
Alors que le personnage de Ben Ali est, comme celui de Macbeth, hanté par le fantôme du souverain qu'il a remplacé —ici plus de roi Duncan, mais Bourguiba— la question qui s'impose est celle de l'après-Ben Ali.
Une question qui pourrait bien déplaire au pouvoir en place, dans le contexte très mouvementé qui suit l'assassinat de l'opposant laïc Chokri Belaïd.
En effet, la révolution de Jasmin n'a pas fait disparaître la censure, comme en témoignent les événements violents de juin 2012, à l'occasion du Printemps des arts, à Tunis. Certaines œuvres d'art contemportain exposées à cette occasion, jugées blasphématoires, avaient fait l'objet d'actes de vandalisme.
L'actuel ministre de la Culture tunisien, Mehdi Mabrouk, avait alors annoncé son intention de porter plainte contre les organisateurs pour «atteinte aux valeurs du sacré».
A Jeune Afrique, Lofti Achour livrait cette analyse:
«Dans nos pays, l'art doit insuffler une énergie libératrice et permettre de déconstruire les mécanismes d'emprisonnement dans le politiquement et le religieusement correct.»
Autre son de cloche pour le ministre qui déclarait, suite aux incidents du Printemps des arts:
«L'art doit être beau mais n'a pas à être révolutionnaire.»
Des déclarations qui ont choqué nombre d'artistes tunisiens, salués notamment pour leur rôle dans la révolution de 2011.
Lu sur Kapitalis, The Arab review, Jeune Afrique
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