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Rwanda - «Trois fantômes français» qui hantent Paris vingt ans après le génocide
Dans le cadre de son enquête sur l’attentat contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994, le juge français Marc Trévidic a découvert un certificat de décès falsifié d'un gendarme français, René Maier, mort à Kigali en avril de cette même année, annonce le journal Libération.
Outre René Maier, un autre gendarme français Alain Didot et son épouse Gilda —tous trois retrouvés morts les 12 et 13 avril 1994— sont décédés dans des circonstances mystérieuses pour ne pas dire secrètes près de 20 ans après les événements.
Le nouvel élément que constitue le faux certificat de décès pourrait compliquer l’enquête du juge parisien... ou, au contraire, combler quelques points d’interrogation sur le rôle joué par Paris au moment de l'attentat contre l'avion présidentiel. Le gendarme concerné René Maier et son collègue Alain Didot étaient en effet conseillers techniques: chargés des transmissions radio, ils suivaient à partir du domicile des Didots des conversations de haute importance.
«Ces deux gendarmes, chargés des transmissions radio entre l'ambassade de France et l'armée rwandaise, ont-ils écouté des conversations qu'ils n'auraient jamais dû entendre et qui concerneraient l'attentat déclencheur du génocide?», s'interroge l'éditorial de Libération.
Le «faux» pose problème et rend l’affaire véritablement inédite.
«Dans un compte rendu, reprenant l’essentiel du procès-verbal et que Libération a pu consulter à Kigali, le juge Trévidic aurait jugé ces faits "gravissimes" et de nature à réorienter sa propre enquête sur l’attentat», explique le quotidien français.
Interrogé par le juge parisien, Michel Thomas, le médecin dont la signature apparait sur le certificat de décès, et qui travaillait alors pour l’armée française à Bangui où faisaient escale la plupart des évacués du Rwanda, a catégoriquement nié être le signataire du document.
L’ancien médecin-militaire a en outre affirmé qu’il ne disposait pas à l’époque du type de tampon officiel utilisé sur le document, de même qu’il établissait ses certificats à la main, alors que le document concerné fut tapé.
Détail plus étonnant encore ; le médecin aurait remis en question lors de son audition les conclusions du document sur les causes du décès, qui parle de décès «accidentel» dû à des «balles d’arme à feu».
Pour Libération, il est clair que la découverte des «trois fantômes» et du faux certificat renvoient au rôle joué par la France au moment de l’attentat contre l’avion présidentiel, un tel document n’ayant pas pu être validé sans l’accord de responsables français haut placés.
Contacté par Libération, le frère de Gilda Didot témoigne en outre des pressions exercées sur sa famille: «on» aurait fait signer aux parents de la défunte un document stipulant qu’ils s’engageaient à ne pas ouvrir d’enquête sur la mort de leur fille.
Lu sur Libération
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