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Bain de foule de François Hollande à Alger le 20 décembre 2012. Philippe Wojazer / Reuters
Bain de foule de François Hollande à Alger le 20 décembre 2012. Philippe Wojazer / Reuters

Amis Marocains, la France vous aime aussi

François Hollande a certes choisi l'Algérie pour sa première halte maghrébine, mais le Maroc demeure le préféré.

Alors, on boude? On râle et on s’inquiète? Tout cela parce que François Hollande, président de la bonne vieille République française, jadis mère patrie pour nous et mère protectrice pour vous, s’en est venu faire un petit tour par chez nous?

C’est vrai, a priori, il y a de quoi être un peu vexé. L’Histoire retiendra que l’Algérie aura été la première sortie maghrébine du président français (ce qui, au passage, fait une belle jambe aux Algériens, mais passons). Cette prééminence, on vous l’agitera sous les yeux, une manière comme une autre de vous faire bisquer sans avoir à parler du Sahara… Vous savez, la fameuse smata algérienne…

Espoir d'une nouvelle dynamique franco-algérienne

Ajoutez à cela que l’on peut décemment considérer cette visite officielle comme une réussite prometteuse. Bien sûr, tout n’est pas réglé mais l’espoir existe de voir naître une nouvelle dynamique franco-algérienne. Bref, c’est nous les Algériens «qu’on a» les faveurs de la France en ce moment.

Enfin, c’est une (double) façon de parler. En réalité, nous n’avons que les faveurs de l’emballement médiatique. Dans quelques jours, que dis-je, dans quelques heures, tout sera oublié, mes confrères journalistes de l’Hexagone s’intéresseront à autre chose (comme l’imminence de la fin du monde, par exemple) et l’Algérie et la France se réinstalleront dans leur train-train habituel en attendant la prochaine polémique ou le prochain bras d’honneur.

Car, c’est ainsi, on ne peut s’empêcher de se chamailler et de continuer à vouloir régler des comptes vieux d’un demi-siècle et plus.

Le Maroc demeure le préféré

Amis Marocains, si parmi vous, certains craignent que la France officielle ne se détourne de votre pays au profit du notre, empressez-vous de les rassurer. Le Royaume restera el-moufadal (le préféré). Dites-leur d’abord qu’on aura du mal à nous défaire de notre vilaine image. Que nous avons encore beaucoup de chemin à faire avant qu’un homme politique français n’ose dire qu’il aime l’Algérie et les Algériens.

L’Algérie attend encore son Jean-René Fourtou, grand patron déterminé à faire augmenter les investissements français au Maroc. Nous n’avons pas non plus l’équivalent en France de ce cercle d’influence pro-marocain dont vous disposez à droite comme à gauche.

Les femmes et les hommes politiques français nés au Maroc sont nombreux, fiers de le dire, contents d’y revenir et prompts à le soutenir en toute occasion. Ceux qui sont nés ou qui ont vécu en Algérie, sont tout aussi nombreux mais ils préfèrent parler d’autre chose. On sent leur gêne, leur envie de se dire d’ailleurs, à l’image de Jean-François Copé à qui il faut parler d’Algérie si l’on cherche à plus que le taquiner…

Il faut dire aussi qu’on y met du notre. Il y a dix ou vingt ans, on aurait pu essayer d’user du passé commun, même s’il a été en grande partie douloureux, pour faire naître de nouvelles connivences. Au lieu de cela, on continue à se dresser sur nos ergots dès lors qu’il s’agit de la France…

Le Maroc, une Algérie rêvée

Vous avez d’excellents lobbyistes, nous avons des spécialistes du nif (fierté) mal placé et chauvin. Vous savez éluder, on prend tout au premier degré surtout quand c’est Fafa (la France) qui parle. Il se passera encore beaucoup de temps avant que nous puissions accueillir des charters entiers de parlementaires, de chefs d’entreprises, d’acteurs ou de journalistes à la recherche d’un douillet dépaysement.

Vous avez La Mamounia et d’autres palaces, des riads à vendre ou à louer, les tagines et la pastilla, bref, un tout-plein d’avantages que même la victoire électorale de vos barbus ne remettra pas en cause.

Nous, c’est différent. Nos hôtels Pouillon tombent en ruine faute d’entretien et de touristes, l’ombre des promoteurs immobiliers plane sur nos Casbah sinistrées et, plus les années passent, et plus l’art de faire un bon méchoui se perd.

A bien des égards, de nombreux Français, vous savez ces officiels et officieux un brin paternalistes, voient dans le Maroc une sorte d’Algérie rêvée et vous avez l’intelligence et l’habilité de ne pas les contredire…

Votre tour, c'est royal

Viendra donc le temps de la visite de François Hollande chez vous. Vous sortirez le grand jeu et l’apparat. A Paris, on se battra comme des chiffonniers pour faire partie de la délégation présidentielle.

Il y aura des patrons du CAC 40 - des vrais, par leurs chargés des affaires publiques ou quelques autres seconds rangs -, des artistes, des journalistes, des modistes, des stars de la chanson et du sport. En clair: la totale royale.

Arrivé chez vous, le président normal, mais impressionné, vous dira à quel point les relations franco-marocaines sont solides, intenses, durables, denses et tout le tintouin. Il tombera amoureux du Maroc comme Chirac et Sarkozy avant lui.

A Alger, quelques moustaches frémiront, des mâchoires se serreront et il s’y dira que, décidément, vous savez y faire…

Akram Belkaïd

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Akram Belkaïd

Akram Belkaïd, journaliste indépendant, travaille avec Le Quotidien d'Oran, Afrique Magazine, Géo et Le Monde Diplomatique. Prépare un ouvrage sur le pétrole de l'Alberta (Carnets Nord). Dernier livre paru, Etre arabe aujourd'hui (Ed Carnets Nord), 2011.

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